21/05/2019

Le plafond de verre dans game of thrones

ATTENTION, si vous n'avez pas encore vu les derniers épisodes de Game of thrones ne lisez pas et même ne scrollez pas. 

Je me suis mise à Game of thrones après tout le monde, l'année dernière mais j'ai vite été happée. Depuis quelques semaines, je me réveillais plus tôt le lundi matin pour le plaisir de regarder le nouvel épisode et surtout pour ne pas être spoilée dès que j'ouvrais facebook ou twitter. Maintenant que c'est fini je regarde à nouveau depuis le début, non seulement ce n'est pas gênant de connaitre la fin mais je découvre plein de détails et de personnages auxquels je n'avais pas trop prêté attention alors qu'ils s'avèrent déterminant pour comprendre certains évènements.

Si j'en parle ici c'est que j'ai lu beaucoup d'articles sur le féminisme réel ou supposé de Game of thrones, curieusement par contre je n'ai pas lu grand chose sur la vision de la masculinité proposée.

GOT, une série féministe ?

Alors oui, je ne me souviens pas avoir regardé une série avec autant de femmes puissantes, dont les caractères sont approfondis de façon non caricaturale et qui assument seules leur pouvoir, c'est à dire qu'elles ne sont pas reines dans l'ombre d'un roi. Bien sûr Cersei l'est devenue parce qu'elle a épousé Robert Barathéon mais lorsqu'elle règne elle est désormais seule. Et de toute façon tous les personnages de GOT existent parce qu'ils sont issus d'une famille régnante, peu de roturiers parmi les héros.

La représentation de ces femmes a considérablement évolué au fil des saisons, Dans la première elles étaient toutes sous la coupe de leurs maris, leurs frères, voire leurs fils et leur seul pouvoir, lorsqu'elles en avaient, comme Catherine Stark, était un pouvoir d'influence. Les choses étaient toutes autres dans la dernière saison ou Daneyris, Cersei, Sansa et Arya roulaient pour elles-mêmes et prétendaient au trône après avoir prouvé leurs capacités à régner. 

Jusqu'à la fin j'ai espéré que l'une d'entre elles emporterait le trône de fer. Le choix fait par les scénariste ne m'a pas trop déçue, par contre j'ai révisé avec les toutes dernières images mon jugement sur le féminisme de la série. Le pouvoir et les postes sont redistribués suite à tout ce qui s'est passé et force est de constater qu'on est alors loin de la parité. 

Première séquence, un conseil qui choisit un nouveau roi.

16 personnages dont certains sont carrément inconnus, alors que les 4 (seulement 4 !) femmes présentes  sont elles incontournables.

J'ai réalisé à ce moment que derrière les principales héroïnes il n'y avait que très peu de second rôles féminins. On a vu passer beaucoup de femmes intéressantes, dont l'histoire aurait pu être développée. Elles ont toutes été sacrifiées, assez rapidement pour la plupart. Me viennent à l'esprit, mais il y en a beaucoup d'autres : Olenna Tyrell (ma préférée), Ygrid, Gilly la femme de Sam qui est elle aussi de sang royal rappelons le, Shae la prostituée dont Tyrion tombe amoureux, Osha la sauvageonne qui sauve Bran, et on regrette bien que Lyanna Mormont ait été tuée car elle aurait eu sa place dans cette réunion.

Ce n'est pas le cas pour les hommes, de nombreux personnages qui ne peuvent pas prétendre au trône ont des rôles essentiels pour le développement de l'intrigue et évoluent sur de longues périodes.

Deuxième séquence, le conseil restreint

Quelques minutes après on assiste à une réunion du conseil restreint, sous la direction de Tyrion. Et là, les choses empirent. Un phénomène classique du plafond de verre, plus on se rapproche du pouvoir moins il y a de femmes. 6 personnes en comptant le roi, une seule femme Brienne de Torth, qui à la stature physique d'une homme et porte des habits masculins. Elle ne dépareille donc pas.

Sansa et Arya se sont éloignées d'elles-mêmes. Préférant être les premières en leur propres royaumes que les secondes à Port Réal. Un choix souvent fait par les femmes.

Cette image, à elle seule remet profondément en cause le supposé féminisme de GOT. Les scénaristes en sont d'ailleurs conscients en terminant par un débat sur la nécessité ou pas de réouvrir rapidement les bordels dans une ville complètement dévastée. ça semble être de l'humour, mais ça ne m'a pas fait rire. 

L'image du masculin 

Finalement c'est peut-être dans l'image qu'elle donne de la masculinité que GOT s'avère plus subversif . Le pouvoir suprême, habituellement dévolu à celui qui a emporté toutes les joutes, qui a su asseoir son autorité, donc le plus fort et le plus couillu reviens à un infirme, qui nous a précisé au début de la saison 8 qu'il n'était plus tout à fait un homme, donc impuissant, et un nain. On est loin de la masculinité hégémonique instaurée en modèle dans nos sociétés. Bran ne se préoccupe ni de position sociale, ni de richesse et d'acquisition de biens prestigieux, il ne cherche pas à se faire valoir et a gardé le contact avec ses émotions. Tyrion quant à lui a vécu la plus grande partie de sa vie en étant humilié et méprisé par son père. Il a longtemps cherché à valoriser son égo, mais il a désormais compris que les vraies valeurs sont ailleurs.

Le trône de fer est remplacé par un fauteuil roulant, l'image est forte mais il semble que le nouveau conseil, à commencer par Bran, reproduit en quelques minutes les fonctionnements antérieurs. Dont l'exclusion des femmes du pouvoir,  à mon avis cela augure assez mal de l'avenir de Westeros.

La trajectoire de Jon Snow laisse cependant perplexe. Le trône devrait lui revenir, non seulement il en est l'héritier légitime mais il a toutes les qualités requises pour l'occuper : il est intelligent, courageux, loyal , attentif aux autres et j'en passe. Indéniablement il est le souverain dont les gens de Westeros, enfin ce qu'il en reste, doivent rêver. Alors pourquoi pas lui ? Bien sûr il est contraint de partir, mais cela pourrait s'arranger une fois que Ver Gris qui veut le tuer aura rejoint son île. C'est que Jon Snow ne veut pas du pouvoir. Comme si celui-ci était incompatible avec tant de gentillesse et de souci des autres. 

Il y aurait beaucoup d'autres choses à dire sur l'image des hommes et des femmes dans Game of thrones, notamment sur la façon dont le sexe et les viols sont présentés ou sur l'hystérie supposé des femmes dès qu'elles ont du pouvoir (Cersei, Daenerys) Il y a déja eu beaucoup d'articles sur ces sujets. J'y reviendrai peut-être.

07/05/2019

Le manque de charisme de Nathalie Loiseau

Le premier ministre a participé ce matin  à un meeting pour les élections européennes et les médias titrent sur le soutien qu'il apporte à sa tête de liste, qui en aurait bien besoin selon eux.

C'est que le manque de charisme de Nathalie Loiseau apparait aujourd'hui comme un problème dans cette campagne. La question se pose alors : comment une personne aussi brillante, ayant réussi une très belle carrière et que tous ceux qui ont travaillé avec elle décrivent comme une bonne manageuse d'équipe, peut-elle s'avérer aussi fade en tant que personnalité politique ?

Je ne reviendrai pas sur ses propos ou son action. Cette campagne manque certainement de souffle, et elle a mal géré les accusations qui ont été faites à son encontre. Mais si il suffisait de ressortir des histoires vielles de 30 ans pour dézinguer quelq'un en politique ça se saurait.

Non, elle manque de charisme parce qu'elle n'a visiblement jamais travaillé, ou mal, son langage non-verbal . Ses compétences et sa forte légitimité suffisait peut-être à faire d'elle une leadeuse dans son milieu de fonctionnaires. C'est bien différent lorsqu'il s'agit de s'adresser au peuple.

Regardons y de plus près.

Sa posture

La première chose qui saute aux yeux et qu'elle ne se tient pas droite. Elle n'est pas très grande, et il est vrai que la taille est toujours un avantage. Un avantage dont bénéficient évidemment plus souvent les hommes. Il n'est pas confortable de devoir s'adresser  à ses interlocuteurs en levant la tête. Mais ce n'est pas suffisant, Martine Aubry n'est pas grande et on ne peut pas dire qu'elle manque de charisme, Tyrion Lannister non plus. De plus, cet inconvénient disparait lorsqu'on parle du haut d'une tribune, ce n'est donc pas une explication suffisante.

En fait, et on le voit nettement sur les photos, elle a toujours les épaules et  la tête légèrement penchées en avant. Ce qui ne donne pas du tout l'impression d'une personne bien ancrée, à laquelle on pourrait s'accrocher.

De plus, lorsqu'elle parle, il arrive fréquemment qu'elle penche la tête sur le coté. Un geste éminemment féminin, qui est perçu comme un signe de sollicitude, ou une tentative de séduction. Pas forcément adapté dans ce contexte. 

Son regard

2eme point très important. Son regard ne se fixe pas sur ses auditeurs. 

Quand elle parle, que ce soit à un journaliste ou à une salle, ses yeux sont focalisés sur un point lointain. On le voit nettement sur cette vidéo d'un échange avec des journalistes, ou cette  autre d'un discours de campagne . En fait elle est concentrée sur  l'intérieur d'elle-même. Or, ce qu'on appelle "la présence" se situe en priorité dans le regard, une personne nous semble présente si on ressent qu'elle prend en compte notre propre existence. Il est vrai que c'est beaucoup plus difficile pour ceux qui sont introvertis, ce qui est probablement le cas de Nathalie Loiseau.

Ses mouvements 

3eme élément.  Ses mouvements parasites.

Elle en a plein. Ils sont assez discrets mais suffisants pour là encore ne pas donner une bonne impression d'ancrage. Bien entendu un orateur peu bouger, mais ses mouvements doivent accompagner son discours et donner le sentiment qu'il est bien avec son corps. Ce n'est pas du tout le cas de ses mouvements, qui sont erratiques voire désordonnés et traduisent plutôt son léger malaise. Ce sont des micro-mouvements des épaules ou de la tête, et surtout des balancements, signes de réassurance. Vous pouvez le voir dans les vidéos précédentes, ou dans cet interview de Jean-Pierre Elkabach, qui est plutôt sympa avec elle. On entend d'ailleurs très nettement dans celle-ci que sa voix est mal placée, beaucoup trop haute. Son discours se veut ferme, mais sa voix n'est pas du tout aussi assurée que son propos.

Ses mimiques

En coaching on appelle ça de l'auto-sabotage : elle termine souvent ses phrases par un sourire. Celui-ci est généralement interprété comme une atténuation du propos. Ce que confirme le fait qu'en même temps elle descend la tonalité.

On peut même y voir un léger syndrôme de la bonne élève, ce qui serait un comble pour une ex directrice de l'ENA

Sur le même sujet  Anne Hidalgo et l'art de l'accolade

18/02/2019

L'empire du LOL

Cette histoire de ligue du LOL me parait la preuve qu'on est collectivement en train de devenir fous. Il devient plus qu'urgent de définir des modalités pour nos rapports sociaux qui tiennent compte de l'importance qu'ont pris les réseaux sociaux dans nos vies.

Cet évènement, qui est loin d'être anodin, et qui fait écho à d'autres évènements de l'actualité de ce week-end, est, comme l'on noté de nombreux articles, un reflet de ce qui se passe depuis toujours dans la société : les phénomènes de harcèlement, de meutes et de boys band ne datent pas d'hier. Mais ce qui restait auparavant circonscrit dans un périmètre fermé peut désormais faire le tour du monde en quelques minutes et toucher des personnes qui n'en aurait jamais entendu parler auparavant. 

Et les analyses qui ne font pas l'effort de sérier les problèmes ne font qu'ajouter à la confusion.

Avant de commencer je peux dire que j'étais déja sur twitter en 2009, pas ou peu sur facebook par contre. A cette époque twitter était l'endroit ou se rencontraient les initiés : journalistes, blogueurs, spécialistes du web et quelques marketeurs. J'y ai passé de nombreuses soirées et ce dont je me souviens c'est qu'on rigolait vraiment. Je m'y suis fait beaucoup d'ami-e-s que j'ai fini par rencontrer en vrai et qui le sont restés. 

Je ne peux pas dire que j'ai été victime de harcèlement. Je ne suis pas de la même génération, je ne cherchais pas à me placer ni à trouver du travail. Mais j'ai quand même eu quelques soucis. Notamment avec quelqu'un dont j'ai vu passer le nom ces derniers jours et qui aurait fait l'objet de plaintes. A l'époque ma principale peur, et donc mon talon d'Achille,  était que mon identité ne soit découverte. Je passais déja pour la féministe de service dans mon milieu professionnel et je craignais que la tenue d'un blog ne me fasse définitivement basculer dans la catégorie "hystérique revancharde". Peur parfaitement infondée d'ailleurs car lorsque je suis sortie de l'anonymat, au moment de la parution de mon livre, c'est exactement l'inverse qui s'est passé. J'y ai plutôt gagné en légitimité. Bref, lorsque ce blogueur connu a pris la peine de me consacrer 2 ou 3 billets de suite j'ai fait le dos rond, craignant qu'il ne dévoile mon nom, facile à trouver je suppose pour quelqu'un de motivé, et je l'ai banni de mon fil twitter. Aujourd'hui encore je défollowe systématiquement les personnes qui le retweetent régulièrement.  Il avait donc disparu de mon paysage, et moi du sien. A l'époque les seules à avoir embrayé, visiblement dans le but de fayoter auprès de lui, étaient des femmes.

Quels sont donc  les phénomènes en jeu dans cette histoire ?

Le harcèlement

On parle beaucoup du harcèlement scolaire, mais également du harcèlement dans le cadre professionnel.
On sait que :
  • les garçons harcèlent plus que les filles, ils harcèlent des filles et des garçons. 
  • les filles harcèlent surtout des filles. De fait les filles sont donc plus souvent victimes de harcèlement que les garçons
  • les comportements de harcèlement diminuent avec l'âge
On sait que le harcèlement a à voir avec les système de domination, que les harceleurs s'attaquent à ceux qu'ils perçoivent comme "harcelables" c'est à dire le plus souvent des personnes qui présentent une caractéristiques permettant de les désigner comme "différentes" et, par là, de créer autour d'eux la communauté de ceux qui sont "normaux".  Il s'agit pour le harceleur d'asseoir son positionnement, au détriment de sa victime.
Bien évidemment, dans une société machiste, où les hommes sont habitués à se sentir supérieurs aux femmes, ils peuvent trouver du bénéfice à se comporter ainsi. C'est ce qui est décrit comme le phénomène des boy's club. La sociabilité des hommes est, bien davantage que celle des femmes, construites sur la base de groupes assez homogènes (qui se ressemble s'assemble) mais néanmoins hiérarchisés. 

Mais dire, comme je l'ai lu à maintes reprises que le harcèlement est systémique et que tous les hommes sont des harceleurs cela revient à dédouaner ceux qui le sont.  Or, et c'est également vrai dans les établissements scolaires, tous ne harcèlent pas, heureusement, car ce n'est pas parce que l'organisation sociale induit certains types de comportements que tous s'y adonnent. 

Je connais mon Bourdieu sur le bout des doigts, mais il y a un moment où il faut sortir du déterminisme social pour interroger la responsabilité des gens. On sait aujourd'hui que la fameuse expérience de Stanford qui démontrait que n'importe quel gentil étudiant se transformait  en tortionnaire pour peu que le contexte s'y prête a été menée sans aucune rigueur scientifique et ne peut plus être invoquée comme explication. 

L' effet de meute

Les humains étant des animaux sociaux, être à l'intérieur ou à l'extérieur d'un groupe constitue un enjeu important.  La ligue du LOL semblait un groupe valorisant, permettant même, si j'ai bien compris, de se placer au sein de grandes réactions. Mais pour faire partie d'un groupe, il faut en épouser les normes et s'y comporter de la façon attendue.  Cela semblait d'autant plus facile dans ce cas qu'il s'agissait de faire de bonnes blagues. L'effet de groupe constitue un accélérateur naturel : 
  1. pour en faire partie il faut faire ce que le groupe attend
  2. comme tous les autres le font cela semble normal. 
  3. pour se distinguer, faire figure de leader il faut en faire un peu plus
  4. etc, etc 
Il est bien évident que les réseaux sociaux démultiplient ces effets, par le nombre de personnes potentiellement touchées, mais aussi par la facilité de l'action. Ce n'est pas la même chose d'écrire 140 caractères, tout seul face à son écran, que d'insulter une personne face à face. 

Mais là encore il convient de graduer, entre ceux qui se revendiquent comme leader,  et les cercles concentriques qui gravitent autour : ceux qui participent activement en espérant en tirer un bénéfice, ceux qui soutiennent, en ricanant, ceux qui soutiennent passivement, ceux qui se taisent parce qu'ils craignent de se retrouver à leur tour harcelés, ceux qui tentent de réagir et enfin ceux qui ne se rendent pas compte.

Il est édifiant de lire les excuses de tous ces journalistes brillants, bien éduqués, qui ne sont plus des ados immatures (à moins que...)  car "ils ne se rendaient pas compte de la souffrance de leurs victimes". Ils n'ont donc jamais appris à prêter attention aux autres ?

Choisir le camp du bien

Dans la culture judeo chrétienne le monde est divisé entre le Bien et le Mal, Dieu et le Diable et chaque acte doit pouvoir être rangé d'un coté ou de l'autre.  

Bien entendu chacun prétend se trouver du coté du Bien. La principale fonction de twitter, qui rend ce lieu désormais tellement pénible , semble être d'organiser les batailles. Chaque camp cherche à se compter, à impressionner l'autre par sa puissance et doit convaincre les spectateurs (nombreux sur twitter où très peu de gens sont en réalité actifs) du bien fondé de sa position. 

Le problème étant que le Bien varie souvent en fonction du vent, et que ce qui vous classe aujourd'hui dans le bon camp peut très bien basculer demain. Les aventures de la ligue du LOL en sont un exemple parfait. 

A cela s'ajoute quelque chose qui est propre à notre époque : la valorisation du statut de victime. Il suffirait de démontrer que l'on est victime de quelque chose, ou de quelqu'un pour se retrouver de facto dans le camp du Bien. Comme si le monde était simple et binaire. Les fonctionnement de types victimes/persécuteurs/sauveurs sont pourtant bien connus et qui est victime aujourd'hui peut se retrouver persécuteur demain, indéfiniment, en un mouvement de balancier infernal. Les tombereaux de boues déversés depuis 2 semaines sur les membres de la ligue du LOL ne tarderont probablement pas à les faire apparaitre à leur tour comme des victimes. Le web est plein d'histoires de ce type.

Tout se passe comme si les réseaux sociaux étaient érigés en tribunaux et se chargeaient de dire qui est coupable, innocent, qui doit être condamné et de quelle peine.

Espérons que tout ne soit pas prescrit et que de véritables procés, pourront se tenir. Les coupables et les victimes y ont droit. 

Mais le pire ne serait il pas les décisions prises par les médias, qui ont mis à pied, sans autre forme de procès des journalistes ? Terrorisés de se retrouver à leur tour classés dans le camp du mal. Ils ont ainsi contribué à justifier les accusations et a es désigner à la vindicte populaire.   D'autant plus que l'amalgame a été fait avec une autre affaire : le Huffington post a licencié des journalistes pour avoir insulté des collégues. Dans les 2 cas on retrouve du harcèlement d'hommes journalistes envers des femmes. Mais le Huffington a, en tant qu'employeur, une responsabilité envers ses salariés et doit veiller à contrôler les risques psychosociaux. Très différent donc.

Tout cela m'aura au moins permis de découvrir que Laurent Joffrin qui  se sent meurtri , était au fond un grand féministe !

 

05/11/2018

Les femmes peuvent-elles se mettre nues pour faire de la politique ?

Dix femmes du Vermont, démocrates, ont posé nues pour une séance photo intitulée «Grab Them by the Ballot» (attrape-les par le bulletin). Une référence explicite à la phrase prononcée par Donald Trump , «grab them by the pussy».  L'objectif serait de convaincre les éventuels abstentionnistes à voter lors des prochaines élections de mi-mandat.


Les modèles ont été choisies pour représenter au mieux la diversité, que ce soit par leur âge, leur physique, ou encore leur couleur de peau.

Le hashtag #GrabThemByTheBallot s'est placé parmi les tendance de Twitter, mais ne l'a peut-être pas été pour les raisons souhaitées car ce sont surtout des commentaires négatifs qui ont été enregistrés.

Cette idée n'est pas nouvelle.

Elle est celle qui guide l'action des Femen, dont la 1ere manifestation date en France de 2012

mais auparavant des femmes politiques tchèques avaient édité un calendrier dans lequel elles posaient très déshabillées. J'avais fait un billet sur le sujet en 2010

Des femmes polonaises qui avaient crées un parti avaient également posées nues sur leurs affiches. Leur argument était que "Cette affiche a pour but de briser les stéréotypes du monde anachronique de la politique, où dominent le plus souvent des hommes renfermés dans leur costumes cravates noirs. Nous, nous sommes belles, nues, fières. Nous sommes vraies, sincères dans l'âme et le corps. Ce n'est pas de la pornographie, ça n'a rien à voir avec le sexe, nos visages sont intelligents, préoccupés, fiers. Nous n'avons pas les lèvres entrouvertes ni les yeux fermés.


Il ne semble  pas que la technique soit particulièrement efficace si l'on en juge par les résultats aux élections. Certes, à plusieurs reprises une femme a été première ministre en Pologne, mais aujourd'hui le gouvernement polonais compte 6 femmes pour 16 hommes.  Et le sujet de l'IVG reste fragile.

Même l'austère Angela Merkel avait montré un très avantageux décolleté pour une affiche d'élection.


Je ne vois toujours pas en quoi cela pourrait inciter les électeurs à voter, ne pas voter ou choisir plutôt tel ou tel parti et il me semble même, mais c'est totalement intuitif, qu'une femme politique qui jouerait cette carte prendrait le risque d'une perte de crédibilité.

En même temps, si des personnalités de 1er plan, telles que Marlène Schiappa, Myriam El Khomri et Roselyne Bachelot ont pris la peine de réciter sur scène une pièce aussi forte que "Les monologues du vagin", c'est bien dans le but de mettre en lumière les conséquences pour la moitié de l'humanité d'une différence physiologique. Il est important de ramener les choses à leur juste valeur : si les femmes sont traitées comme des êtres de seconde zone, c'est bien à cause de cette différence génitale. Différence dont les femmes qui posent sur ces affiches veulent se montrer fières. 

Le corps reste un enjeu majeur

Je crois que mon point de vue a beaucoup évolué sur ce sujet. J'étais très septique, voire critique lorsque sont apparues les Femen. Dans un monde où l'attention envers les femmes se portent sur leur corps plutôt que leurs propos, je trouvais maladroit d'en faire un argument électoral car il me semblait que le terrain à conquérir en priorité était celui du pouvoir, qui se gagne par la parole.

Je pense toujours bien sûr que le pouvoir est conquérir, mais depuis 2010 ou 2012 beaucoup de choses ont changé. Ce que l'on pourrait appeler la "contre révolution masculine" a pris de l'ampleur. Partout dans le monde des hommes politiques, des groupes, assument et prônent des idées visant à limiter les libertés des femmes et à les renvoyer à leurs fonctions biologiques. Il importe de ne pas redevenir la moitié invisible de l'humanité et de revendiquer notre place et notre différence. Cela passe par la liberté du corps.

Par ailleurs, je vois dans ces photos un rappel à ce qu'est l'être humain : fait de chair et de sang, fragile, mortel, à comparer avec ceux qui dirigent le monde et semblent des clones invulnérables.

29/10/2018

Dans une société plus égalitaire les différences de sexes sont accentuées. Comment est-ce-possible ?

Des chercheurs des Universités de Bonn et Berkeley, ont entrepris une étude de grande envergure sur la façon dont le développement économique et l'égalité entre les sexes influent sur les choix comportementaux que font les hommes et les femmes.

L'étude, de grande ampleur puisqu'elle portait sur 80 000 personnes, a montré qu'une richesse nationale plus élevée ou une meilleure égalité entre les sexes étaient liées à des différences plus grandes entre les préférences comportementales des hommes et des femmes plutôt qu'à plus de similitudes. 

Vous pouvez trouver un article complet sur cette étude dans Cerveau et Psycho.

Pour ce faire, ils ont croisé le PIB par habitant de chaque pays, ainsi qu'un indice d'égalité avec les réponses à des enquêtes qui demandaient aux participants comment ils réagiraient dans différents scénarios impliquant six facteurs sociaux : la prise de risque, la patience, l'altruisme, la confiance et la réponse à des  interactions positives ou négative . 

Ils ont constaté que plus le PIB ou l'indice d'égalité est élevé plus il y a  de différences dans les préférences comportementales des hommes et des femmes .

Intuitivement on s'attend à un résultat inverse.

On pense qu'avec des ressources et possibilités d'agir identiques les comportements vont s'harmoniser. C'est même l'un des objectifs de toutes les actions en faveur de l'égalité. Or c'est l'inverse qui est observé.

L'explication qui vient à l'esprit serait que de bonnes conditions matérielle et l'égalité donnent aux hommes et aux femmes "plus de liberté pour exprimer des comportements différents, liés à leur genre, sans être contraints par des difficultés économique ou sociales qui les obligeraient à se conduire différemment de leurs aspirations. Dans ce scénario, une femme qui travaillait dans un domaine dominé par les hommes il y a 50 ans pouvait se sentir obligée de se comporter comme un homme. Mais avec une représentation plus égalitaire des sexes dans l’entreprise, ces contraintes s'estomperaient, ce qui lui laisserait plus de liberté pour exprimer des préférences plus sexuées si elle le souhaite".

Les auteurs insistent cependant sur le fait qu'on ne peut pas en conclure que ces préférences sexuées seraient innées ou biologiquement déterminées.;

En réalité cette étude ne tient pas compte de l'âge, or il serait particulièrement interessant et utile de savoir si les réponses varient selon les générations, car c'est  peut-être bien plutôt la façon dont les personnes ont été éduquées qu'elle mesure.

04/10/2018

Les efforts de LIDL

Certaines choses avancent. Il faut savoir être optimiste et reconnaitre ces petites victoires, même lorsqu'elles sont minimes.

En 2010 et 2013 j'avais fait des billets pour dénoncer les publicités sexistes des catalogues LIDL. (soulignons au passage que les publicités dans les boites aux lettre représentent 1/4 du papier consommé en France et qu'il serait peut-être temps d'y mettre de l'ordre)

Depuis LIDL fait visiblement des efforts

01/10/2018

Short au college, l'effet sur les garçons

Le jour de la rentrée des classes une personne avec qui j'échange depuis des années sur twitter a raconté comment sa fille de 11 ans, partie le matin en short est rentrée à la maison avec un pantalon même pas propre. La CPE lui aurait enjoint, ainsi qu'à plusieurs autres jeunes filles, de se changer. Plus d'explication sur le compte twitter de @Galliane

L'explication donnée aux fillettes aurait été que "ça excite les garçons", puis celle donnée aux parents que ce n'est pas conforme au règlement intérieur qui stipule que les élèves doivent porter une tenue propre et décente et proscrire les vêtements négligés ou provocants. Toute la question étant alors de savoir si un short constitue une tenue décente ou négligée ou provocante.

L'affaire a fait un peu de bruit et plusieurs magazines en ont rendu compte, car c'est un sujet récurrent. Faut-il règlementer la façon dont les femmes, et même les petites filles s'habillent ? Question qui est rarement posée au sujet des garçons, qui ont pourtant longtemps porté des shorts jusqu'à un âge tardif sans que personne ne s'en émeuve.

On peut cependant observer que la situation est inverse pour les adultes. Les femmes au travail ont plein de possibilité de varier leurs tenues et de porter des vêtements légers et adaptés lorsqu'il fait très chaud alors que dans tout le tertiaire les hommes sont contraints de mettre des pantalons longs. ça aurait pourtant de la gueule une réunion de ministres en shorts non ?

Il me semble cependant que le plus grave n'est pas ce que ces injonctions font aux filles, mais ce qu'elles font aux garçons. La sexualité n'est pas qu'un comportement de reproduction, elle l'est même très rarement de nos jours chez les humains. C'est un comportement social, construit symboliquement.

Qu'apprend-t-on à des enfants en leur disant qu'une petite fille en short excite les garçons ?

J'ai cherché des articles universitaires pour développer mon idée et je vous conseille cette conférence de Philippe Liotard. Maître de conférences en sociologie à l'Université Lyon 1 «Corps, sexualité, identité la construction des rapports filles/garçons à l’école… et au-delà »

Comment apprend on à se comporter avec les personnes, du même sexe ou du sexe opposé, à partir des représentations qu'on a de la sexualité ? Comment les individus apprennent-ils à se servir de leur corps pour se donner du plaisir, ou se reproduire, ou les 2 ?

Il cite, entre autres des travaux de Marcel Mauss, anthropologue des années 30 qui avait élaboré un index des pratiques sexuelles à travers le monde et démontré qu'elles étaient très différentes d'un continent à l'autre. 

L'éducation est un double apprentissage de transmission mais aussi d'intégration. L'apprentissage de la sexualité c'est d'abord l'apprentissage de normes et de valeurs : ce que je dois faire, mais aussi ce que j'imagine que je dois faire, ce que je dois aimer pour me comporter comme un homme, un vrai, ou comme une femme respectable. Ce que je peux faire en fonction de mon statut, de mon âge. Ces normes apprises très tôt structurent notre façon de penser pour la vie.

A 11 ans les enfants, qui ont déja bien intégré les comportements de genre, arrivent à l'âge où ils vont se poser des questions sur la sexualité. Questions qui sont pour eux : "si je fais ça est-ce que c'est normal ?", "est ce que c'est conforme à l'image que je veux donner de moi ?"

Or, leur suggérer qu'une jeune fille en short va exciter les garçons c'est :

- indiquer aux filles qu'elles doivent faire attention à ne pas exciter les garçons, qu'elles sont responsables de ça. C'est cette injonction qui est actuellement vivement décriée

- indiquer aux garçons, et l'on parle beaucoup moins de l'injonction faite aux garçons, qu'ils doivent être excités par la vue des jambes nues de leurs camarades, que c'est naturel et que pour leur éviter une tentation trop forte dans le cadre scolaire l'institution s'occupe de les en préserver.

Or, si les adolescents sont évidemment prompts à s'émouvoir et découvrent les plaisirs et les affres de leur sexualité, ils peuvent aussi côtoyer leurs camarades sans penser au sexe. A cet âge les questions sur les sentiments et les relations amicales ou amoureuses sont aussi importantes, voire plus importantes que les questions sur le sexe. Or que pensera un petit garçon qui a entendu que le short est interdit pour les filles car cela excite les garçons et qui ne ressentira rien à la vue de ces jambes nues ? Il aura peur de ne pas être normal, de ne pas être assez viril. C'est donc une incitation à s'exciter aux bons moments, comme on l'attend d'un vrai mâle. Par contre si il a une érection il se sentira normal, et pourra même s'en vanter auprès de ses camarades garçons.

Les féministes protestent contre le fait que l'on demande aux filles de se vêtir alors qu'il faudrait demander aux garçons de ne pas agresser. En réalité c'est très en amont qu'il faut prendre la question : avant de leur apprendre à se contrôler il faut arrêter de leur faire croire que la norme viril est de bander à la vue du moindre bout de peau.  Il faut leur apprendre que les relations avec les autres passent par de multiples canaux et que le sexe n'en est qu'un aspect qui ne se concrétisera que dans une minorité de ces relations.

28/09/2018

1ere Université du féminisme : Muriel Penicaud a promis l'égalité professionnelle dans 3 ans

Discours de Muriel Penicaud à l'université du féminisme

que vous pouvez écouter à 18 mn de cette vidéo
 
La première chose a noter est que la ministre du travail est indéniablement féministe et plutôt militante sur le sujet. C'est une bonne chose.

Evidemment elle a fait valoir son action.

Elle considère que le moment est favorable pour de grandes avancées et elle est convaincue, elle cite à cet effet Simone de Beauvoir, que le travail est un élément essentiel pour la liberté des femmes

elle rappelle que, non seulement la France est 11eme sur 144 des classements internationaux pour ce qui est de l'égalité H/F. Ce qui n'est déja pas très glorieux pour une nation qui a inscrit l'égalité dans sa devise. Mais surtout, qu'elle est 129eme pour l'égalité salariale !

L'une des raisons en est le travail à temps partiel des femmes, subi la plupart du temps, que ce soit du fait de l'entreprise ou de celui des contraintes familiales. Il pourrait en être autrement, aux Pays-bas par exemple les hommes prennent aussi du temps partiel.

Muriel Penicaud insiste sur le fait que la loi qui oblige travail égal/salaire égal est vieille de 45 ans et qu'elle n'est MASSIVEMENT pas respectée, ce qui est assez unique pour une loi de la République.

Mais elle pense que la période est favorable à des grandes avancées car plus personne aujourd'hui, ni homme politique, ni chef d'entreprise, n'oserait déclarer qu'il est contre l'égalité. Avec Marlène Schiappa, elles ont donc oeuvré à inscrire des mesures favorables à l'égalité dans la nouvelle loi pour la liberté de choisir son avenir professionnel (loi sur la formation professionnelle).

Le principal apport de cette loi est qu'elle transforme l'obligation de moyen en obligation de résultat. Les entreprises ont 3 ans pour arriver à l'égalité.

     - Chaque entreprise devra publier ses résultats en la matière sur son site, ce qui devrait, selon elle, être très incitatif car les entreprises sont désormais soucieuses de leur image.

     - Contrairement à ce qui se dit ce ne sera pas une usine à gaz car toutes les données sont déja dans la DSN (déclaration sociale nominative, qui servira entre autres au prélèvement à la source).
La mesure portera sur les inégalités de salaires mais aussi sur les types de postes, les augmentations etc

     - Une enveloppe de rattrapage des salaires des femmes devra être inscrite au budget des entreprises

     - Les contrôles de l'inspection du travail sur ce sujet seront multipliés par 4. Attention elle n'a pas dit que les inspecteurs seront 4 fois plus nombreux, et pour ce que j'en sais les contrôles sur l'égalité hommes/femmes sont très peu nombreux et les inspecteurs globalement assez peu motivés sur le sujet .  D'ailleurs il ne leur ai guère proposé de formations spécifiques sur le sujet, ni de sensibilisation aux fonctionnement des stéréotypes.

Par ailleurs les nouvelles règles du compte personnel de formation, qui sera utilisé à la discrétion des salariés sans qu'ils n'aient à obtenir l'autorisation de leur employeur devrait leur ouvrir davantage de possibilité.

Elle espère également que le développement du télétravail, associé à une politique "intelligente" d'accueil des jeunes enfants permettra aux parents de concilier plus facilement travail et vie familiale. Et cela concerne tout particulièrement les mères seules.

Globalement je dois dire que je la trouve bien trop optimiste. et que je crois pas 1 seconde que l'égalité professionnelle sera atteinte dans 3 ans?

24/09/2018

Non mixité à la SNCF

C'est sur twitter que j'ai vu passer cet organigramme, récent. Je suis même allée vérifier que ce n'était pas un fake tellement il me semblait incroyable. Mais il est bien réel comme vous pouvez le voir ici

Rappel : La SNCF est un EPIC, c'est à dire un établissement public à caractère industriel et commercial et c'est une personne morale de droit public ayant pour but la gestion d'une activité de service public. Donc l'Etat a quand même quelque chose à dire et ça serait bien qu'il le dise.

Je me demande si Raphael Enthoven dirait de ces réunions que : (j'ai changé quelques mots pour adapter la citation à ce contexte)
"ce serait pécher par optimisme (ou par cécité volontaire) que d’imaginer qu’on laisse l’esprit de division derrière soi quand on sort des réunions non-mixtes : il est faux de prétendre que la non-mixité n’imprègne pas fondamentalement la vision du monde et de la société de ceux qui y recourent, et qu’elle ne peut pas favoriser la tentation d’un repli communautaire. Comment croire qu’il n’y a aucun lien de causalité entre l’isolement des hommes de toute présence féminines dans des réunions du CODIR et la diffusion de discours simplificateurs sur les compétences des femmes ou le maintien des égalités de salaires? "

20/09/2018

Université du féminisme : Le dicours de Raphaël Enthoven . Résumé et commentaires

Le discours de Raphaël Enthoven est la séquence des universités du féminismes qui a été la plus commentée. Il faut dire que non seulement il est le seul homme, hormis le porte parole du gouvernement,  à avoir bénéficié d'une tribune pour lui tout seul, mais que cette tribune a été, et de loin, la plus longue de ces 2 journées. Un homme qui monopolise la scène longtemps, voila qui n'est pas très féministe.

Je l'ai trouvé assez pénible, il parlait fort, hurlait presque, avec des effets de style et de manches pédants. Visiblement il aime s'écouter parler. A ce propos vous pouvez lire ce qu'en dit ce blog de rhétorique. Je crois que j'ai assez vite décroché, mais je me suis rattrapée en lisant le texte intégral de son intervention ici.

Comme il est long  je vous en fait un résumé commenté.

Du coté du bien...et de la ministre

Il commence par remercier chaleureusement la ministre en la félicitant de ne pas avoir cédé à ceux, et surtout celles, qui voulaient l'empêcher de prendre la parole. Légèrement flagorneur je trouve. D'autant plus qu'il ne rate pas une si belle occasion de rappeler qu'il a écrit la préface du livre de Marlène Schiappa sur le viol.

Son vocabulaire est celui du combat : des courageux (lui évidemment) contre les lâches. Combat qui reste cependant verbal puisqu'il se passe en réalité sur les réseaux sociaux, mais n'en est pas moins violent et qu'il décrit avec une débauche de mots : anathèmes, avanies, insultes, confiscation du débat, profération, vilipendée, accusations insensées, vacarme.

Il annonce ensuite le sujet qui lui a été proposé, et qu'il qualifie de bizarre "Peut-on parler du féminisme quand on est un homme ?

Féminisme et antiracisme

Il explique en quoi cette question lui parait anormale (pour plus d'analyses sur les arguments utilisés voir le blog sus-cité) et surtout fait un parallèle avec d'autres combats menés au nom de l'égalité, notamment celui contre le racisme. 

La question commune de toutes ces luttes est "au nom de l'égalité entre les individus : faut-il privilégier la parole des concernés". Il y répondra évidemment par la négative, sinon il ne pourrait plus parler de grand chose n'étant guère concerné que par l'antisémitisme comme il l'explique plus tard. 

Il veut bien reconnaitre que "rien ne remplace le fait d'avoir vécu ce dont on parle" et que les réunions non-mixtes permettent aux femmes de se sentir plus libres pour discuter, mais il relègue cet argument au second plan car l'effet premier selon lui  est de communautariser le combat. 

En ce qui me concerne j'ai toujours pensé et dit, que le combat féministe ne pouvait pas traité de la même façon que ceux des minorités. Pour deux raisons, simples. La première est que les femmes sont 52% de la population et ne sont donc pas une minorité, la seconde parce que les hommes et les femmes sont obligés de vivre ensemble, ne seraient-ce pour perpétuer l'espèce. Dans une société on peut cloisonner et faire que jamais ne se rencontrent les personnes d'ethnies, de religions, de cultures, d'orientations sexuelles différentes, on peut faire en sorte que leurs vies soient radicalement différentes on ne peut pas empêcher que les hommes et les femmes vivent ensemble, que les garçons côtoient leurs mères et leurs soeurs. Raphaël Endhoven reprend ici un parallèle qui est désormais commun mais pollue considérablement le débat car il revient à utiliser les mêmes arguments pour des causes qui ne sont pas de mêmes natures.

Il continue sur ce terrain, pour expliquer les risques de cette non mixité fut elle provisoire. La mixité ne permettra pas de résoudre un problème qui est social et ne concerne pas que celles et ceux qui en souffrent. Elle ne permettra aucunement de faire disparaitre la domination masculine. Au contraire peut-être c'est un remède qui aggrave le mal en  augmentant le cloisonnement qui est ce que l'on combat et en favorisant le repli communautaire. Or, je le redis je récuse le terme de communautarisme pour ce qui concerne les femmes.

Il termine cette partie par un couplet sur ce qu'est être victime. On peut le suivre lorsqu'il estime que les victimes ne sont pas les mieux placées pour dénoncer car la violence subie n'est pas bonne conseillère et la souffrance n'est pas un diplôme. Qu'elle "est une loupe qui donne à ce qui nous arrive l'ampleur d'une vérité universelle" Mais comment peut-il aller jusqu'à cette phrase "Etre victime n’est pas un passe-droit, mais une exigence supplémentaire" ?

Les féministes contre lui

Il termine en reprenant les accusations qui lui sont faites personnellement : négation de la culture du viol, racisme

L'un de ses argument massue est que celles-là même qui lui reprochent d'être un homme et donc illégitime pour intervenir dans le débat font preuve de la même véhémence envers les femmes qui ont signé la tribune pour le droit d'être importunée. Comme quoi le genre ne fait rien à l'affaire.

Pour ce qui est des propos racistes, et il termine là-dessus il remarque que toute tentative de critique envers une association comme Lallab ou le voile islamique sont traités comme des propos racistes. Ce qu'ils ne sont pas.

Conclusion engagée certes mais qui n'apporte rien de nouveau à ce que l'on lit à longueur de journée sur les réseaux sociaux.

Et alors ?

Tout ce long discours vise à expliquer en quoi Raphaël Endhoven se sent parfaitement légitime pour parler de féminisme.

OK. De toute façon je n'y voyais pas vraiment d'inconvénient.
Mais ce qui m'aurait bien davantage intéressée aurait été de savoir ce qu'il pouvait apporter aux débats en tant qu'homme, ce qu'il pouvait lui contribuer à changer de sa position. Pas un mot là-dessus. 25mn donc pour dire en quoi c'est normal qu'il parle pendant 25mn.
 

Pour que vous compreniez l'ennui de la salle quelques phrases, que je ne comprends pas n'étant pas moi-même doctrice en philosophie :

"N’en déplaise à ses défenseurs, la relative efficacité d’une méthode n’a jamais préservé de ses effets délétères, tout comme l’efficacité d’un médicament n’exclut pas la possibilité d’effets indésirables. Le dire n’est pas s’en réjouir. Une description n’est pas une prescription."
 
"Car le fait d’insister, comme ils le font, sur le caractère «provisoire» et «limité» de la non-mixité, revient à suggérer, même inconsciemment, qu’on connait, même quand on y est favorable, les risques que ferait courir à l’unification de la société l’extension dans le temps et dans l’espace d’une telle logique cloisonnante. Et pour cause la non-mixité promet de s’abolir, de disparaître d’elle-même le jour où le racisme disparaîtra."

18/09/2018

Journalistes, arrêtez de vous indigner des propos d'Eric Zemmour, questionnez le

Je suis assez dépitée de devoir parler de Eric Zemmour dont la stratégie est simple. Il a un livre à vendre et pour cela il doit faire le buzz avec un maximum de provocations. Rien ne l'arrête et c'est le meilleur moyen pour que cela fonctionne, plus il va loin dans le politiquement incorrect plus ça marche. Le mieux serait de ne pas en parler, mais je voudrais quand même revenir sur les propos qu'il a tenu, non pas à Hapsatou Sy, mais ceux qui concernent les femmes et le pouvoir.

Je voulais titrer cet article "les femmes diluent-elles le pouvoir ?" mais en cherchant des références je me suis aperçue que j'avais déja utilisé ce titre en 2013 sur Rue89 où j'écrivais, et que j'y avais publié à peu près le même l'article que j'envisageais d'écrire aujourd'hui. Comme quoi Eric Zemmour ne se renouvelle pas du tout, inutile donc d'investir dans son nouveau livre qui n'est probablement que la réplique des précédents. Son radotage tourne en boucle, mais il tourne bien.

Et j'en ai un peu marre des journalistes qui se contentent d'ouvrir de grands yeux et s'indigner, qui est exactement ce qu'il attend. Si son discours passe aussi bien c'est parce qu'il entièrement fondé sur des observations peu discutables, mais les liens qu'il fait entre les éléments sont eux éminemment discutables et ce sont ces liens qu'il conviendrait de reprendre. Il faudrait lui demander ce qui lui permet d'affirmer cela ou de lui apporter des contre exemples.

Donc, hier il a dit sur LCI, que si sa fille devenait Présidente de la République il serait fier sur plan personnel mais ce serait un signe supplémentaire de la décadence. Indignation de ces interviewers qui le traite de macho, comme si c'était un scoop. 

Mais que dit-il ?

Qu'il a a fait l'effort, dans son nouveau livre qui vient de sortir, de parler de femmes qui ont du pouvoir (comme quoi il s'adapte):  Catherine de Médicis, Madame de Pompadour, Madame de Staël et Simone de Beauvoir. Notons que, hormis Catherine de Médicis, aucune de ces femmes n'a occupé un poste officiel. Il s'agit de pouvoir intellectuel ou de pouvoir d'influence. D'après lui ce fut chaque fois une catastrophe.  

Reprenons :

Je ne connais pas trop Madame de Staël. Wikipedia m'apprend que "Grâce à la publication de De l'Allemagne, elle popularise en France les œuvres des auteurs de langue allemande, jusqu'alors relativement méconnues." Pour Eric Zemmour c'est le début de la germanophilie qui nous a désarmé face à l'Allemagne et nous a conduit jusqu'à la 1ere guerre mondiale. Un propos qui méritait plusieurs questions

  • un seul livre peut-il suffire à influer toute l'histoire de l'Europe pendant un siècle (il a été publié en 1814) ? Pour le coup c'est donner beaucoup d'importance a l'oeuvre d'une seule femme. 
  • en admettant que ce soit le cas, en quoi le fait qu'il ait été écrit par une femme change-t-il quelque chose ? Un homme n'aurait il pas pu écrire ce livre ?

Je connais très bien par contre la vie et l'oeuvre de Simone de Beauvoir. Pour Zemmour la catastrophe provient du décalage ente les deux, elle fait le contraire de ce qu'elle écrit. Là encore il devrait développer, je suppose qu'il le fait dans son livre (qu'il est donc hors de question que je  subventionne).

Certes Simone de Beauvoir a vécu de façon bourgeoise alors qu'elle professait des idées très à gauche. Mais on pourrait dire la même chose de Sartre, et de nombreux autres auteurs ou hommes politiques. Pour n'en citer qu'un on pourrait prendre l'exemple de Rousseau qui a écrit un livre sur l'éducation alors qu'il a abandonné ses enfants.  Et pour ce qui est des idées de Simone de Beauvoir, son oeuvre majeure reste Le deuxième sexe et on ne peut pas nier que sa vie fut celle d'une femme libre, féministe, qui a soutenu de façon active et engagée toutes les autres femmes. A quoi fait-il donc allusion : probablement à ses lettres d'amoureuse à Nelson Algreen. Facile a démonter. 

Il ne précise pas dans cet extrait en quoi le pouvoir de  Catherine de Médicis a été catastrophique, mais Catherine de Médicis est, avec Margaret Tatcher, l'archétype de la façon dont son traitées les femmes réellement puissantes. C'est à dire comme une sorcière (cf le livre de Mona Chollet  qu'il est bien préférable d'acheter), ni sur madame de Pompadour dont le pouvoir fut uniquement d'influence, dans des conditions extrêmement difficiles puisque fondé sur la séduction et révocable à tout instant .

Zemmour revient en fait sur le même sujet qu'il développait en 2013, "il y a un rapport très complexe entre le pouvoir et les femmes les femmes ont beaucoup de mal à exercer le pouvoir", mais il progresse car à l'époque il leur déniait toute possibilité d'exercer le pouvoir, la preuve selon lui : il n'y a quasiment pas de femmes au pouvoir. 

En fait Eric Zemmour pratique une technique basique, mais souvent efficace, qui consiste à généraliser. En partant de quelques exemples il tire des conclusions valables pour l'humanité toute entière. Comme si on prenait l'exemple de  Hitler pour en conclure que tous les hommes de pouvoir sont des dictateurs dérangés, ou celui d'Harvey Weinstein pour dire que tous sont des violeurs. Le pouvoir des femmes "ce fut chaque fois une catastrophe " comme si on ne pouvait pas citer des hommes dont le pouvoir aboutit à des catastrophes. 

Il a cependant raison dans sa conclusion "Le pouvoir c'est phallique", en tout cas tel qu'il est exercé dans nos société. 

17/09/2018

1ere université d'été du féminisme

J'ai passé 2 journées la semaine dernière à la 1ere université du féminisme. Je n'ai pas perdu mon temps car c'était vraiment très riche. La plupart des articles ont surtout parlé des intervenants qui faisaient polémique, et c'est vraiment dommage car les autres interventions invitaient davantage à la réflexion. Mais je suppose que si on veut qu'on parle de ces journées il faut trouver un moyen de faire le buzz. Pour cela Elisabeth Lévy et Raphaël Enthoven étaient les clients parfaits. 

L'organisation par contre d'une table ronde entre une représentante de Lallab et une représentante du Printemps républicain sur voile et féminisme n'était pas une bonne idée. 10mn sur l'un des sujets les plus sensibles qui soit ce n'était pas jouable et plutôt qu'à un débat c'est à un pugilat qu'on a assisté, les 2 parlant en même temps la moitié du temps leurs propos étaient complètement incompréhensibles, d'autant plus que la salle réagissait vivement huant ou applaudissant . Il m'a semblé qu'elle était légèrement plus hostile aux propos de Lallab mais n'ayant pas d'applaudimètre je n'en suis pas certaine. 

Il y a sur le site du ministère une video, complète je crois, de la seconde journée. Il y a aussi beaucoup d'extraits sur la page facebook du secrétariat d'état.

J'y reviendrai surement car il y a matière à faire de nombreux billets.

Je vous recommande pour aujourd'hui le sketch très drôle, sur un sujet qui ne l'est pas, le tunnel de la comédienne de 50 ans et le super pouvoir d'invisibilité des femmes de cet âge, des 3 comédiennes Blandine Metayer, Catherine PIFFARETTI et Mariane TOME (ici sur facebook ). Ce qui n'est pas représenté n'existe pas, or, alors que 1 femme majeure sur 2 a plus de 50 ans, le pourcentage des actrices de plus de 50 ans dans les films français en 2016 est de 6%. 

"Avec l'âge les hommes murissent, les femmes vieillissent. Les gros plans des femmes vieilles c'est moche, les gros plans des hommes vieux c'est beau". "on est ménopausées, mais bien vivantes !"

Pour finir, et c'est dans la vidéo, Marlène Schiappa y conclut de façon brillante avec une anaphore bien vue "J'EN AI MARRE...",

  • "j'en ai marre de devoir dire à ma fille "est ce que tu dois vraiment mettre un short"? 
  • "j'en ai marre d'entendre des femmes qui me racontent qu'elles ont été violées" 
  • "j'en ai marre qu'elles n'en aient pas parlé avant" 
  • "j'en ai marre des inégalités de salaires",
  • etc

04/09/2018

Poker : jouer avec les stéréotypes

Je vous conseille la lecture de cet article du New-York Times (il est en anglais)

Maria Konnikova est doctrice en psychologie expérimentale (oui, je féminise les mots de façon à ce ce que cela s'entende, ce qui n'est pas le cas de docteure, et je trouve que doctoresse n'et pas fluide ).
Elle a décidé, dans le cadre de ses travaux, d'étudier le poker et a appris pour cela à jouer, pour de vrai. Elle n'y connaissait absolument rien, a pris une année sabbatique pour se former et jouer de façon intensive et elle a mis à peine un an pour gagner 200 000 $.
Son doctorat portait sur la confiance excessive et la prise de décision risquée. Elle explique dans cet interview qu'elle s'intéresse à la façon dont les gens prennent des décisions, et pour elle le poker était un bon exemple de décisions dans lesquelles la chance intervient mais aussi les compétences.
Elle voulait savoir si les personnes ayant une haute confiance en soi prenaient de meilleures décisions dans des conditions risquées. Habituellement, les personnes ayant une bonne confiance en elles font beaucoup mieux que les personnes en ayant peu. Mais c'est moins le cas  dans des environnements imprévisibles comme les jeux, car ces personnes peuvent être trop confiantes et ne prennent pas assez en compte les aléas externes.

En ce qui la concerne, et c'est pour cela que je vous en parle, elle a rapidement su que la première chose que les joueurs remarquaient était son genre. Et qu'ils lui appliquaient tous les stéréotypes habituels. Et quand elle a compris comment ces joueurs voyaient les femmes, elle a su comment jouer contre eux. Et elle a gagné !

Elle explique que
"Il y a des hommes qui préfèrent mourir plutôt que d'être bluffés par une femme. Ils ne se coucheront jamais avec moi parce que c'est un affront à leur masculinité. Je ne les bluffe jamais. Je sais que peu importe la force de ma main, ils vont toujours m'appeler parce qu'ils ne peuvent tout simplement pas plier devant une fille."
"D'autres pensent que les femmes sont incapables de bluffer. Ils pensent que si je parie vraiment avec agressivité, cela signifie que j'ai une main incroyablement forte. Je bluffe ces gens tout le temps"
Elle dit aussi qu'elle a été pas mal harcelée car certains hommes n'acceptent pas qu'une femme s'assoie à une table de poker. Elle a eu sa revanche quand elle a ramassé leurs jetons.

30/08/2018

Décryptage ONPG de l'échange entre MArlène Schiappa et JC Van Damme

A voir sur ce blog de Rhétorique

29/08/2018

La masculinité hégémonique

Je vous ai parlé du post cast "Les couilles sur la table" que je vous recommande chaudement. 

Aujourd'hui je veux parler de l'épisode du 24 mai sur le thème "Pourquoi le sport reste encore un truc de mecs". Victoire Tuaillon y a invité Thierry Terret qui est historien du sport, auteur d'un monumental ouvrage Sport et genre (4 volumes) et coordinateur d'un livre collectif  Sport, genre et vulnérabilité au XXe siècle En réponse aux questions de Victoire Tuaillon sur la présence massive des hommes dans tout ce qui tourne autour du sport il développe longuement le concept de masculinité hégémonique. Il le fait de façon très éclairante.


Le sport est une invention masculine, créée pour développer la sociabilité masculine. Il a été pensé par des hommes, pour des hommes et l'arrivée des femmes n'a pas suffi à en modifier les fondements. Parce que, pour commencer, le sport est un spectacle or les femmes doivent rester discrètes, voire cachées, dans leur univers, elles n'ont pas à investir  l'espace public. Par ailleurs le sport est étroitement associé à la compétition,  celle-ci es l'apanage de  la virilité. Aujourd'hui encore les femmes font du sport mais participent beaucoup moins souvent à des compétitions. 

Sport = masculin = violence = exploits

Mais surtout le sport participe à la construction du modèle de masculinité hégémonique. Celle qui représente l'idéal vers lequel les hommes doivent tendre. Elle varie selon les époques et les lieux mais chaque société construit sa propre norme et tous doivent s'y soumettre. 

Toujours la violence est associée au masculin et le sport est une forme de violence. Envers les autres, mais aussi envers soi-même puisqu'il s'agit de se dépasser, de résister à la douleur. Le sport permet la reconnaissance de l'excellence masculine par la démonstration de sa force, son abnégation, son courage. Toutes qualités qui permettent d'évaluer la virilité. L'exploit sportif est également associée l'exploit sexuel. Il est sous entendu le sportif bénéficie d'une grande puissance sexuelle, d'où la distribution massive de préservatifs lors des grands évènements sportifs.

La maitrise technologique, le sens de la stratégie font également partie de la sémantique sportive et renvoie au masculin. Et l'analyse du vocabulaire employé par les commentateurs sportifs montre à quel point ces caractéristiques : souffrance, dépassement de soi, stratégie sont soulignés pour les sportifs, mais pas pour les sportives. 

De plus le sport ne se joue pas que sur le terrain, il est aussi constitué de tout un environnement qui encourage l'entre-soi masculin et valorise les caractéristiques de cette masculinté hégémonique : vestiaires, 3eme mi-temps, chansons paillardes, référence aux femmes comme à des trophées. 

Or, si ce modèle exclut, de fait, les femmes, il exclut également tous les hommes qui s'éloignent de cette norme. Les terrains de sports restent encore des lieux où les insultes de tarlouzes ou PD sont fréquents.  Il y a donc bien des victimes masculines de cette hégémonie. Les homosexuels en premier lieu, mais aussi tous ceux qui ne sont pas forts, rapides, habiles avec un ballon, qui préfèrent des activités différentes, plus calmes ou contemplatives. Dès la maternelle et le début de la socialisation les petits garçons sont sommés de se mesurer à ces normes. Ceux qui n'y arrivent pas, où qui n'aiment pas ces jeux, ou qui aiment le rose et le disent, ou qui préfèrent jouer avec les filles sont exclus ou moqués. Ce sont de grandes souffrances qui sont ainsi engendrées, souffrances qui peuvent perdurer la vie entière. 

Thierry Terret est cependant assez optimiste car plusieurs études montrent que la tendance est à plus  d'égalite et moins de discrimination

Si vous êtes un homme 

Si vous êtes un homme, et là c'est moi qui poursuis la réflexion, si vous voulez sortir de ce piège comment faire ? 

Pas facile j'en conviens, et beaucoup plus compliqué que porter des chaussures à talon rouge un jour dans l'année en criant qu'on est féministe (d'opérette) !

Les questions que vous pouvez vous poser vous renvoient à l'image que vous avez de vous-même et que les autres ont de vous. 

Vous pouvez vous demander 

1/ en quoi vous contribuez à faire perdurer ce modèle ? En vous y  conformant, en le valorisant, en le proposant à vos garçons ?

2/ comment y résister ?  Et là je suppose que l'inconfort et la peur vous gagnent. Bien sûr vous n'allez pas arrêter de faire du sport, d'être la personne sur qui on compte, celle qui ne pleure jamais . Mais alors ? 

22/08/2018

Pratiquez un sport de combat

Si vous me suivez sur ma page facebook, vous avez certainement remarqué que je partageais régulièrement des évènements de type stages de self-défense. C'est que je suis de plus en plus convaincue que si des hommes agressent physiquement des femmes c'est parce qu'ils pensent, et le plus souvent à raison, qu'elles ne sauront pas se défendre correctement et même qu'elles n'essaieront pas.

Et si les femmes ne se défendent pas c'est 

1/ parce qu'elles ne savent pas comment faire, 

2/ parce qu'elles craignent que cela soit encore pire, en quoi elles n'ont pas tort. On l'a vue récemment avec cette vidéo d'un homme qui frappe une femme en plein Paris, devant témoins, parce qu'elle s'est permise de répondre à ses propos injurieux. 

La supériorité physique masculine est considérée comme incontestable.

Or, si les hommes sont généralement plus grands, plus lourds et plus musclés que les femmes ce n'est pas toujours le cas. Et surtout cela n'est pas suffisant pour qu'ils l'emportent systématiquement, d'autant plus que les femmes ont davantage de résistance notamment en situations extrêmes. Et l'histoire est pleine de combattants à priori plus faibles qui ont fini par l'emporter par l'intelligence, la ruse ou leur détermination.

En fait, si les hommes se sentent tellement sûres d'eux pour attaquer une femme c'est qu'ils ont la certitude que non seulement ils sont plus forts, mais qu'elle n'opposera qu'une faible résistance, voire pas de résistance du tout. Car eux se sont entrainés à la bagarre depuis toujours, eux ont appris que s'affirmer, gagner, faisait partie de leur identité. Non seulement les filles n'apprennent pas à se battre, car ce n'est pas très féminin, mais elles apprennent que, quoi qu'elles fassent elles n'y arriveront pas, et qu'il est préférable de renoncer avant que cela ne tourne mal.

Beaucoup de jeux, notamment  adolescents reposent sur des confrontations physiques au cours desquels les garçons se mettent à plusieurs pour, par exemple, mettre une fille à l'eau. C'est drôle, ça permet de se toucher, mais une fille qui résisterait vraiment serait vite cataloguée comme une pimbêche avec laquelle il n'est pas drôle de jouer. Les filles apprennent ainsi qu'il est préférable, voire inutile de se rebeller. L'inverse peut se produire, mais si le garçon réussit à résister et ne pas aller à l'eau ce sera plutôt à son honneur.

Alors certes le mieux serait que les hommes n'agressent pas les femmes, mais si on peut y travailler, il me parait prudent de se protéger et de leur montrer que nous ne sommes pas un sexe faible comme la société s'emploie à le croire. 

L'importance de s'entrainer

Bref ! je suis désormais certaine, et ça n'a pas toujours été le cas, que les filles et les femmes doivent apprendre à se battre. Il n'est pas question de se lancer à corps perdu dans un combat dangereux en cas d'agression mais déja d'avoir une attitude qui pourra surprendre l'agresseur qui ne s'y attend pas et l'inciter à chercher une proie plus facile. Il s'agit pour cela d'acquérir quelques réflexes utiles. 

J'ai essayé pas mal de choses et personnellement ce que je trouve de plus efficace est le Krav-Maga. Malheureusement il n'y a pas de cours là où j'habite, mais j'ai fait 2 stages et je compte bien continuer. Je me suis aussi mise au Karaté, qui est un sport très différent et beaucoup moins opérationnel mais dont la pratique repose également sur la répétition sans fin des mêmes mouvements jusqu'à ce qu'ils deviennent des réflexes. C'est long !

J'aime beaucoup l'état d'esprit de ces sports. Chacun fait à son niveau et les plus aguerris, loin d'étaler leur supériorité, prennent soin des débutants en se mettant à leur portée.

Pas besoin d'être une grande sportive puisque, par définition, la self défense concerne tout le monde. Dans un stage de Krav maga d'environ 60 participants comme celui que j'ai fait il y a des gens de tous les âges et un peu plus d'hommes mais on n'est pas loin de la parité.

Krav Maga Women protect associaton

J'y ai aussi rencontré des personnes qui ont créée une association Krav-Maga Women protect Charity Association dont le but est de développer les pratiques de self défense auprès des jeunes filles en Inde, pays où les agressions sexuelles sont très fréquentes. L'association enseigne les techniques à des femmes des RED BRIGADES, qui transmettent ensuite ce savoir aux jeunes filles.

Ils voudraient également  développer cet enseignement auprès des fillettes en France.

Vous pouvez adhérer ou les soutenir

13/08/2018

La Une de l'OBS : Etre un homme après #METOO

Si vous n'étiez pas en vacances, loin d'internet, vous avez forcément vu passer cette couverture de l'Obs qui a donné lieu à de nombreuses réactions sur les réseaux sociaux. Toutes très négatives.

Si je prends la peine de revenir là dessus c'est que moi je la trouve plutôt interessante.

Que vois-je sur cette photo ?

Un homme, jeune, plutôt beau, torse nu et qui semble bien fichu mais sa position ne cherche pas à mettre en valeur ses muscles et il ne la ramène pas. Il a le regard un peu perdu, pas vraiment triste,  perplexe plutôt. D'après le titre il s'interroge sur ce qu'est "être un homme" de nos jours.
Il est dans une cuisine, qui n'est pas la place habituelle dans laquelle on place les hommes. Le bouquet de fleurs fanées nous donne des indications sur ce qui a pu se passer. Ce qui vient à l'esprit le plus logiquement est que ce bouquet de roses rouges était destiné à une femme, femme absente depuis un certain temps. Et comme il est un homme il ne s'est pas préocuppé du bouquet, ne serait ce que pour le mettre à la poubelle.  Pourtant la cuisine est bien rangée, la vaisselle ne traine pas. On peut donc en déduire qu'il se débrouille. Le chien a cependant l'air un peu inquiet, va-t-il assurer ?

Tout le monde a vu dans cette photo l'idée que l'homme dont la femme s'émancipe se retrouve perdu et que son air, et surtout celui du chien, le montre comme quelqu'un qui se sent victime.

Ce n'est pas du tout ce que j'y vois. Je trouve au contraire que cette couverture est le signe, qu'enfin, la lame de fond féministe de ces dernières années va peut-être arriver à toucher les hommes. Parce que pour l'instant ils sont les grands absents du changement en cours. 

Quel est son problème ?

Il m'arrive fréquemment de donner des conférences, ou de faire des formations sur le thème du plafond de verre et des mécanismes psychosociaux qui maintiennent les inégalités. Toujours, vraiment toujours, il n'y a  qu'une proportion infime d'hommes; de l'ordre de 5 hommes dans une salle de 100 personnes, et il n'est pas rare qu'il n'y en ait pas du tout. Et je ne parle pas des formations, j'ai déja raconté comment j'ai essayé de mettre en place une formation "travailler en mixité" dans laquelle je souhaitais réunir un nombre équivalent d'hommes et de femmes. Cette formation ne s'est pas faite car AUCUN hommes ne s'y est inscrit.

Pourtant, si les femmes, qui ont bien compris désormais qu'elles devaient changer leurs rapports avec les hommes si elles voulaient moins de violences et plus d'égalité, ont concrètement modifié leurs comportements ces dernières années, il reste à ce que les hommes changent les leurs. D'un point de vue systémiques si les femmes changent il va bien falloir qu'ils changent aussi, mais ça risque d'être encore long ! Or, changer une situation qui vous avantage est évidemment une démarche difficile. C'est pourquoi je trouve que l'expression de l'homme sur la photo est tout à fait adaptée. Il comprend qu'un bouquet de fleurs de temps en temps ne suffit plus, et la question fondamentale qui se pose à lui désormais est celle de son propre comportement. Mais quand l'essence de sa personnalité a été construite sur une certaine idée de la virilité qui consiste à prouver en permanence sa puissance : physique, financière, morale, sexuelle sur quoi la refonder ?

Il y a effectivement de quoi être perplexe.

Des articles décevants

Les 3 articles à l'intérieur du magazine sont par contre assez loin de remplir la promesse de la couverture et de nous apporter véritablement matière à réflexion.

Le premier article, très interessant au demeurant est celui d'un journaliste qui a infiltré un stage "Aventure initiatique des nouveaux guerriers". Un stage entre développement personnel et camp scout des années 50. Il s'agit pour les participants de se reconnecter avec leurs émotions, mais aussi de vérifier leur virilité, notamment en restant nus une partie du temps. Une expérience qui permet probablement de comparer les anatomies et de se situer les uns par rapport aux autres. Rien de nouveau sous le soleil.

Le problème de ce stage réside surtout dans le fait de renouer avec cette camaraderie masculine, que les hommes expérimentent déja souvent : dans les vestiaires des stades ou les soirées professionnelles sans femmes, qui restent encore fréquentes. On peut aussi y voir une nostalgie du service militaire, qui permettait de se situer en tant qu'homme. ce n'est d'ailleurs pas un hasard si le mot Guerriers est dans l'intitulé du stage.

Le second article "Comment élever un garçon ?" pose correctement la problématique mais se contente de recenser des articles  sur le sujet sans approfondir quoi que ce soit. Il n'a donc pas beaucoup d'intérêt. Il y a bien 8 conseils pour les parents, mais pour qui a déja un peu réfléchi à la question il n'y a pas grand chose à en apprendre.

Le 3eme enfin est consternant, l'autrice est une sociologue qui décrit les Incels, ces hommes qui se sentent exclus par les femmes, qu'ils n'arrivent évidemment pas à séduire. Au point de perpétuer des massacres. Le problème est qu'elle semble comprendre leur point de vue et les difficultés relationnelles qu'ils énoncent. Son papier se termine même par une menace qui enjoint aux femmes de prendre en compte le phénomène.

Un sujet qui prend de l'ampleur

En fait, la Une de l'Obs est une preuve supplémentaire que ce thème est en train d'émerger. Pour l'instant, si vous voulez de vraies réflexions,  c'est plutôt du coté de l'audio qu'il faut chercher pour avoir des réflexions de qualité. Des émissions de radios de plus en plus nombreuses parlent de masculinité. 

Il y a eu ces derniers mois de nombreuses émissions sur le thème de la virilité, j'y vois un signe qu'effectivement les choses bougent et c'est bien

12/10/2017

Cantat, ce héros romantique

La publication d'un interview de Bertand Cantat, dans lequel il parle de sa vie, puisqu'il a la chance d'être en vie, et sa photo en couverture des inrocks illustre à la perfection l'une des raisons pour lesquelles le nombre de femmes tuées par leurs conjoints, 123 en 2016, ne diminue pas. Rappelons également que, cette même année, 36 enfants ont été tués par leur père.

En France, lorsqu'une personne est condamnée par un tribunal et fait de la prison, il lui est généralement très difficile de se réinsérer. Difficile de trouver un travail, difficile de reconstituer un réseau social car si sa famille peut le soutenir, ce qui est loin d'être toujours le cas, et quelques amis lui rester fidèles, la plupart de ses anciennes connaissances vont plus ou moins l'éviter. C'est que d'une part perdure une certaine méfiance, d'autre part il n'est guère valorisant d'avoir pour ami un délinquant. Le risque étant en effet de se retrouver assimilé à lui.

On le regrette, tout le monde peut en effet commettre des erreurs et a le droit de reprendre une vie normale après "avoir payé sa dette à la société". Mais il s'agit d'une forme de contrôle social : si certains peuvent être indifférents au fait d'aller en prison, l'idée de susciter l'opprobre, pour soi et sa famille, est dissuasive pour quiconque n'est pas complètement asocial.

Un crime excusé et peu stigmatisant

Mais les hommes qui ont tué leur conjointe, la plupart du temps parce qu'elle menaçait de les quitter, ne sont pas regardés de la même façon que les autres criminels. On parle de crime passionnel, avec l'idée  que si ils ont tués c'est parceque leur passion les a submergés et rendu fous. Ce qui apparait comme une motivation extérieure à eux, rendant même la victime coupable d'avoir suscité un trop grand amour.

En plus ils n'apparaissent pas comme dangereux pour les autres personnes, il suffit de ne pas entrer en relation amoureuse avec eux. Et, avant de se trouver soi-même confrontées à des violences conjugales, toutes les femmes pensent qu'elles ne peuvent aimer que des hommes "biens" et qu'elles ne risquent donc rien.

Tout cela fait  que ces tueurs, une fois sortis de prison, ne sont pas mis au ban de la société comme d'autres criminels. La menace de stigmatisation sociale n'est pas aussi opérante. Elle l'est d'autant moins lorsque ces hommes ont un statut social élevé et de l'argent, ce qui facilite évidemment leur retour dans la société.

Un crime qui n'est pas pris au sérieux

 Ces crimes ne sont pas traités par les médias comme les autres crimes. Au lieu de montrer la violence, le sang, les larmes les journalistes insistent plus souvent sur la motivation futile du criminel et des détails tellement sordides qu'ils en deviennent cocasses

- un homme tue sa femme et la jette dans une poubelle

- un américain tue sa femme parcequ'elle se moquait de lui 

- un homme tue sa femme à coup de robinet

etc, etc. vous pouvez lire ces titres tous les 3 jours.

Il y a là une façon de mettre de la distance entre l'horreur de la réalité, qui n'intéresse pas les médias, et le lecteur qui ne voit qu'un fait divers insolite sans faire le lien avec un phénomène de société. Pourtant, cette femme pourrait être sa fille, son amie, sa voisine mais il ne fait pas le rapprochement puisque l'homme qui a tué est un monsieur tout le monde qui a juste eu la malchance d'être d'être devenu fou d'amour. 

Il y a déja plusieurs années que les mouvements féministes tirent la sonnette d'alarme et demandent aux médias de parler autrement de ces crimes. Sans grand succès. 

Un criminel devenu héros romantique

Mais il y a pire, c'est que l'assassin peut devenir dans l'imaginaire collectif un héros de tragédie, ce n'est pas un hasard si le terme "drame passionnel" est utilisé quasi systématiquement.  Si cet homme est dépassé par ses passions c'est d'abord parce qu'il s'agit d'un être dont la passion déborde la raison. Ce qui constitue l'un des ressort essentiel de toute littérature. 

Un héros qui a été souvent chanté par les poètes.

Je l'aimais tant que pour la garder 
Je l'ai tuée je ne suis qu'un fou 
Un fou d'amour, un pauvre fou 
Qui meurt d'amour


Quand en plus cet homme est un artiste reconnu, et talentueux il faut bien le dire, le tableau est complet. Il entre directement dans la catégorie des artistes maudits. Ceux dont l'inspiration vient du coté sombre de l'âme
On peut noter, et cela fait froid dans le dos, que NOIR DESIR annonçait d'emblée ce coté obscur de sa création artistique. La question se pose alors : sans cette noirceur cet artiste  serait-il l'artiste qu'il est ? Marie Trintignant, sacrifiée sur l'autel du génie !  
Offrir la possibilité à Bertrand Cantat de parler de lui, de sa vision de la vie, de sa trop grande sensibilité, de ses souffrances intimes, c'est contribuer à l'édification de ce modèle de héros romantique.

Pas vraiment dissuassif pour tous les hommes qui se sentent humiliés et dépossédés par le comportement de leur femme. Certains peuvent  préférer passer pour un maudit que pour un homme quitté. Ils sont déjà plus de 100 dans ce cas cette année .

27/06/2017

Un homme au perchoir

Contrairement à ce qui avait été promis, après un homme 1er ministre, un homme chef de groupe à l'Assemblée, voici qu'un autre homme est élu au perchoir.

C'est donc pour François de Rugy qu'ont majoritairement voté ses 301 camarades ayant pris part au scrutin.

Christophe Castaner a indiqué que les députés La république en marche n'avaient pas de consignes, et que c'est un groupe composé à 48% de femmes qui a très largement choisi François de Rugy. C'est un fait démocratique, a-t-il dit. Comme si l'exécutif n'intervenait en rien dans le fonctionnement du groupe. Et d'embrayer sur les prochaines désignations à la Présidence des commissions, qui vont être paritaires. On aura donc peut-être des miettes. 

Nous pouvons tirer quelques enseignements de cette élection.

1er enseignement :  Des députées qui croient que la parité est acquise parce qu'elles sont là

Cette assemblée n'a guère de conscience féministe, sans quoi le fait d'élire une femme leur serait apparu comme primordial, car ça l'était. C'est particulièrement inquiétant de la part d'une génération nouvelle, qui a l'air de croire que l'égalité se fait toute seule, comme par magie. Comme si il n'avait pas fallu lutter pied à pied pour en arriver à 38% de femmes à l'Assemblée.

2eme enseignement : L'égalité oui, mais pas au point de se sacrifier

La parité implique que les hommes laissent des places. C'est bien là que le bât blesse. François de Rugy, qui vient du groupe Europe-Ecologie-Les verts, le plus respectueux jusqu'à présent de la parité, n'était certes pas décidé à laisser sa place à une femme pour appliquer les engagements du candidat Macron. Il avait pourtant tenu quelques propos remarqués lors du débat pour les primaire auquel il a participé, qu'il entendait favoriser l'égalité hommes/femmes et même proposé " qu’il y ait une action de groupe poussée par le défenseur des droits pour que lorsque des femmes dans une ou plusieurs entreprises se sentent victimes d’une inégalité salariale, elles puissent agir en justice de ce point de vue là"

Pour les autres,

3eme enseignement : Comment faire du vieux avec du neuf

Ces nouveaux députés, qui se sont fait élire sur un projet de renouvellement de la vie politique, à qui les électeurs ont fait confiance, malgré leur inexpérience,  ont peur et ont besoin de se rassurer en mettant à leur tête des gens plus expérimentés. C'est l'argument principal qui est donné dans les articles de presse, tant pour l'élection de Richard Ferrand que pour celle de François de Rugy. 

Le monde : "Au sein du groupe majoritaire, composé en grande partie de novices, la candidature de François de Rugy est apparue comme un gage de sécurité pour occuper ce poste aussi prestigieux que stratégique. Alors que l'exécutif communiquait sur sa volonté d'installer une femme à la présidence de l'Assemblée, sa connaissance du fonctionnement de l'Assemblée semble avoir été un facteur décisif". 

Les échos, à propos de Richard Ferrand : " Marie Lebec pointant sa connaissance de la vie parlementaire utile pour encadrer moult novices"

Pas très enthousiasmant pour la suite

4eme enseignement : Femmes, soyez sur la photo ! 

Parmi les députés macronistes, deux femmes avaient pourtant postulé, Sophie Errante et Brigitte Bourguignon. François de Rugy a obtenu 153 voix, contre 59 voix pour Sophie Errante et 54 pour Brigitte Bourguignon. Le quatrième candidat, a obtenu 32 voix.

Sophie Errante et Brigitte Bourguignon ne sont pas des novices, c'est leur deuxième mandat et on peut penser qu'elles en savent suffisamment sur le fonctionnement de l'Assemblée pour occuper le perchoir. Même si François de Rugy a l'avantage d'avoir été vice président. Elles présentent surtout l'inconvénient d'être de parfaites inconnues. Ce qui n'est pas le cas de François de Rugy qui a été candidat à la primaire de la gauche. Un moment certainement pénible, mais payant.

On sait que la politique est un monde difficile, où il faut savoir prendre des risques et des coups. Je ne saurais trop conseiller aux nouvelles députées de veiller à se montrer, ce qui signifie s'exposer aux regards.

2 articles, lus aujourd'hui m'y incitent

Celui-ci de 20 minutes, qui interroge 5 nouveaux députés, avec photos. La journaliste aurait-elle fait preuve de sexisme ? Possible mais je parierais bien que lorsqu'elle a cherché des députés à interviewer, ce sont des hommes qui se sont présentés en premier. Une belle brochette dont on va commencer à connaitre les visages

Et la photo de l'article du Monde, déja cité, je la trouve très parlante

21/06/2017

Censure d'une photo de Simone de Beauvoir nue ?

Une comédienne, dont je n'avais jamais entendu parler, a publié un coup de gueule sur facebook qui a été partagé plus de 100 000 fois. Selon elle l'affiche de son prochain spectacle a été censurée par JC Decaux, les colonnes Morris et le métro parisien. 

Dans un texte violent elle dénonce qu' "Aujourd'hui, en 2017, en France, on censure une photographie d'art, avec un cul innocent, sous prétexte que... que quoi en, en fait ? Qu'un corps de femme c'est sale ? Qu'un corps, tout court, c'est sale ? "

En réalité

Jean-claude Decaux dément avoir censuré cette affiche  et précise qu'ils ont préféré demander l'avis de l'ARPP (Autorité de régulation professionnelle de la publicité). Les annonceurs ont raison d'être prudents car cette photo a déja été publiée en 2008 et à donné lieu à une vive polémique. Les Chiennes de garde avaient manifesté devant le siège du nouvel obs aux cris de "On veut voir les fesses de Jean Daniel"

A l'époque les arguments étaient à peu près inverses de ceux qui sont avancés par Camille Lockhart, il s'agissait de "protester contre l'utilisation du corps de la philosophe pour célébrer sa pensée."

Certes le contexte  est un peu différent puisqu'il s'agit de promouvoir un spectacle sur les correspondances amoureuses de Simone de Beauvoir.

Un bon coup de pub

Pour ma part, cette tribune me parait surtout un coup de pub bien joué puisque tout le monde a désormais entendu parler de ce spectacle, mais je doute que faire un buzz à propos de ses "belles fesses charnues" soit un hommage digne de cette femme de lettres, philosophe engagée. 

J'en profite pour remettre ce texte de Simone de Beauvoir paru dans Le Monde en 1983 : La femme, la pub et la haine

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